De Bësch, une expérience immersive

20 sep. 2021
De Bësch, une expérience immersive

© Kullachart Sitjasech
Article en Français
Auteur: Isabelle Debuchy

Au cœur de la nuit, dans la forêt, des personnages vous entraînent à vivre un spectacle hors du commun. Une pièce de théâtre, où spectateurs et spectatrices auront en quelque sorte leur rôle à jouer… Alors prêt·e·s pour De Bësch ?

Tout est très intriguant et le restera pour ménager le suspense… Ce projet théâtral, mis en scène par Anne Simon et Max Jacoby, tous deux réalisateur·rices et scénaristes luxembourgeois, fait intervenir six personnages. Chacun d’eux déroule sa partition aux spectateurs munis d’une lanterne qui se déplacent dans la forêt. « Une déambulation qui peut devenir méditative » affirme Max Jacoby, qui se réjouit : « Cette expérience théâtrale se déroule à l’extérieur et permet de retrouver des sensations qui nous manquaient tellement ! » Il précise que « L’idée originale de ce spectacle est née de la frustration liée au confinement et aux spectacles virtuels auxquels les spectateurs pouvaient assister pendant cette période ». Mais venons-en à l’expérience proprement dite qui se noue autour de cette interrogation : « La réalité commence-t-elle quand la fiction s’arrête ? » Vaste et captivant programme !

Le·la spectateur·ice est partie prenante de la représentation théâtrale, car il·elle va devoir discerner la frontière entre réalité et réel. Le réel existe-t-il vraiment, objectivement, indépendamment de soi ? Ou est-il ensorcelé par l’imagination ? N’est-il qu’une construction des sens et de projections singulières ?

© D.R

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Anne Simon et Max Jacoby s’emparent de la confusion possible que toute croyance consiste à prendre une fiction pour une réalité et que pourrait être objet de notre perception ce qui n'est pourtant objet que de notre imagination. De Bësch invite donc à attiser ses cinq sens pour explorer de grands thèmes métaphysiques et universels : Qu'est-ce que la vérité ? Dans quelle réalité voulons-nous vivre ? Avons-nous vraiment le libre arbitre ou le choix n'est-il qu'une simple illusion ?

Ce spectacle hybride, inspiré de Sa Majesté des mouches de William Golding et de Matrix des deux sœurs réalisatrices Lana Wachowski et Lilly Wachowski, puise aussi à des extraits de textes, de Alice au Pays des Merveilles de Lewis Caroll à Macbeth de Shakespeare, de Marie Stuart de Friedrich von Schiller à Le crime parfait de Baudrillard, et à sa phrase qui donne le ton du spectacle : « Etant donné l’accumulation des preuves, il n’y a pas d’autre hypothèse plausible que la réalité. Étant donné l’accumulation des preuves du contraire, il n’y a pas d’autre solution que l’illusion. »

Neuf théâtres ont co-produit « ce projet ambitieux » souligne Max Jacoby. Le scénario met en scène un journaliste d’investigation qui découvre que le monde dans lequel il vit n’est qu’une illusion. Il trouve un moyen d’échapper à ce simulacre et se retrouve dans une forêt – « De Bësch » – ce qui reste du monde d’autrefois. Il y rencontre des personnes qui ont, soit de force, soit volontairement, quittés l’état de leur ignorance bienheureuse. Certains d’entre eux aspirent à créer le meilleur des deux mondes, les autres vont faire face à ce qu’ils sont, quand ils découvriront les raisons de l’asservissement virtuel de l’humanité.

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Ce scénario n’a ni début, ni milieu, ni fin, « c’est un puzzle » s’en amuse Max Jacoby. Chaque spectateur plongé dans le dédale de son imagination s’appropriera le récit de l’un des personnages et élaborera son propre spectacle. « Nous avons une vision d’ensemble de nos personnages, et à chaque moment, nous savons ce qu’ils font et où ils sont. C’est un peu un jeu de pistes et tout se passe dans la forêt » précise-t-il.

Seuls Max Jacoby et Anne Simon ont donc une vue d’ensemble de la pièce qui se joue « en live », mais ils laissent aux spectateurs le soin de conclure par eux-mêmes à l’issue de cette expérience immersive. Terreau de notre imaginaire, la forêt est un espace de tension entre le réel et l’imaginaire, elle est à la fois « Un récit qui nous oblige à reconnaître le monde dans ce qu’il a de tangible » et « depuis toujours un endroit très propice au surgissement de la fiction. » (Pierre Schoentjes). C’est de cette potentialité poétique dont il est question dans De Bësch et d’un jeu en sens inverse qui mènera les spectateurs, au cours de cette expérience immersive, de la fiction à la réalité.

De Bësch, spectacle mis en scène par Max Jacoby et Anne Simon avec Jil Devresse, Denis Jousselin, Rosalie Maes, Dominik Raneburger, Konstantin Rommelfangen, Pitt Simon. Spectacle en plusieurs langues les 24., 25., 26. septembre (départs de Echternach, Mamer, Niederanven), 1., 2., 3. octobre (départs de: Soleuvre), 8., 9., 10. octobre (départs de Ettelbruck, Mersch, Wiltz) 18h30 - 22h30. Covid Check Event. Billets echo.lu.

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