Fondation Sommer - Entretien avec Sandrine Guivarch

28 nov. 2022
Fondation Sommer - Entretien avec Sandrine Guivarch

Article en Français
Auteur: Godefroy Gordet

Fondée en 2016 par feu Pierre Brahms, entrepreneur, philanthrope et figure incontournable des cadres de l’intelligentsia luxembourgeoise, la Fondation Sommer se faisait discrète jusqu’alors, malgré une réelle implantation au cœur du secteur culturel par le soutien de projets essentiels, en collaboration notamment avec des structures telles que le CAPE – Centre des Arts Pluriels Ettelbruck ou le Mudam – Musée d’Art moderne Grand-Duc Jean. Après plusieurs années dans le soutien de projets culturels à destination de l'empowerment des jeunes, la Fondation Sommer complète ses ambitions à l’initiative et par le dynamisme de sa nouvelle directrice Sandrine Guivarch, qui, dans une grande complicité avec son binôme Veronika Meindl-Meilheuret, est bien décidée à « faire bouger les choses ». Aussi, la fondation inscrite dans le paysage culturel luxembourgeois sur 35 ans, de la volonté de son père, il reste donc à l’équipe un peu moins d’une trentaine d’année pour compléter ses objectifs… Et si déjà, la Fondation portait avec brio ses engagements, avec la venue de Madame Guivarch, une directrice énergique à l’aube d’une nouvelle étape très stimulante dans son parcours personnel, les missions posées semblent s’étirer, quand d’autres appétences se posent et notamment les notions de « mises en réseaux » et de « continuité des projets ». Ainsi aujourd’hui, en sus du reste, la Fondation Sommer se positionne en tant qu’acteur moteur dans l’empowerment des jeunes en donnant une impulsion aux projets portés, par un accompagnement en profondeur des porteurs, et l’identifications de leurs publics cibles. Sandrine Guivarch, précise tout cela en répondant à nos questions avec un enthousiasme communicatif vis-à-vis de ce nouveau challenge auquel elle prend part.

Bonjour Sandrine Guivarch, après huit années à travailler pour Handicap International au service legs et donation, vous prenez la direction de la Fondation Sommer pour défendre ses valeurs, stimuler des actions dans ce sens, et faire sortir de la louable discrétion que portait jadis la Fondation. Pouvez-vous résumer votre parcours, expliquer votre rôle au sein de la Fondation Sommer et ce qui vous a poussé à vous y investir ?

Ça vient d’un besoin d’évolution personnelle, de carrière, même si je n’aime pas ce mot. Je me posais des questions à l’approche de la cinquantaine. J’étais depuis huit ans chez Handicap International. Je vivais une très belle expérience, mais j’observais l’envie d’autre chose. J’occupais un poste empli de sens, de valeurs, je voulais logiquement rester dans ce genre de cadre professionnel, à Luxembourg… Ça limitait un peu le champ de prospection. Quand j’ai vu passer l’annonce du poste de direction de la Fondation Sommer, je me suis rendu compte que ça me correspondait à l’envie que j’avais de me mettre au service d’un projet comme celui que distille la Fondation.

Précédemment, j’ai passé huit années chez Handicap International, au sein d’une équipe incroyable, une famille d’une quinzaine de personnes. Je suis arrivée lors d'une création de poste, pour la collecte de fonds et effectivement pour m’occuper de tout ce qui était marketing, relationnel, auprès des donateurs, des entreprises, des fondations, des legs et un petit peu d’événementiel. Il a fallu tout construire et j’adore ce genre de défi, quand il n’y a qu’une page blanche et qu’il faut la remplir. Et puis comme un symbole, la notion d’empowerment des jeunes à la Fondation Sommer était très présente chez Handicap International auprès des personnes en situation de handicap. Il s’agissait de savoir comment on peut faciliter leurs conditions de vie, et comment est-ce que leur environnement leur permet d’évoluer en dépit de leur handicap. Il ne s’agit pas de prendre la place des pouvoirs publics mais d’essayer d’impulser des changements au bénéfice des personnes en situation de handicap, avec cette idée que c’est le système qui doit changer et s’adapter à ces personnes. Pour moi cette notion était déjà une évidence et correspondait pleinement à ce que je pouvais apporter à la Fondation Sommer.

J’ai toujours eu par le passé, dans mes précédents postes, une vision globale des choses, comme chez Handicap International, où je suivais de très près ce que faisaient les équipes de terrain, ou les équipes de sensibilisation. Pourtant, à un moment donné, la pression constante de ce travail m’a fait ressentir une forme d’usure, et une envie de découvrir que d’autres opportunités pouvaient s’ouvrir à moi.

Je me sentais capable de m’impliquer dans ce projet, et suite à la succession de Pierre Brahms et mon arrivée à la Fondation, qui double l’effectif, on bénéficie de plus de latitude, on se fixe plus d’objectifs et de fait beaucoup de choses sont à faire, à prolonger, à renforcer. Ce qui constitue un beau défi pour moi.

Je suis également heureuse de retrouver le secteur cultuel. J’avais par le passé travaillé dans le secteur culturel. C’est comme ça que je suis arrivé au Luxembourg en 2006. J’ai travaillé à l’Institut Pierre Werner, un institut franco germano luxembourgeois, qui avait à l’époque vocation à ouvrir un débat d’idées sur des questions européennes, mêlé à des projets culturels. Mon parcours universitaire et mon doctorat en sciences politiques autour du postcommunisme, faisait sens au cœur des projets mené par l’Institut.

Ensuite, j’ai pris la responsabilité du Festival Frontières à Thionville. Un festival transdisciplinaire créé dans le cadre des frontières géographiques et sociales. Tous les deux ans, nous menions une programmation avec des artistes du spectacle vivant, des intellectuels, des auteurs… L’idée était d’amener la culture en dehors des cadres institutionnels classiques. Toute la ville, pendant une semaine, était embarquée dans le festival.

Ces expériences m’ont permis de développer mon carnet d’adresses autour de personnes du secteur culturel et social au Luxembourg. Ça m’a permis aussi de bien connaître le territoire luxembourgeois et de m’y implanter. Travailler au sein de la Fondation Sommer c’est aussi une façon pour moi d’inscrire mon travail sur des projets plus locaux et ainsi d’honorer le pays qui m’a accueillie il y a plus de quinze ans. D’une certaine manière, j’ai envie de rendre à la société luxembourgeoise ce qu’elle m’a apporté, en mettant ma pierre à l’édifice dans le cadre de mon travail à la Fondation Sommer.

Depuis mon arrivée, beaucoup de choses se sont concrétisées et notamment grâce à un conseil d’administration très impliqué, ouvert à la discussion sur des aspects parfois sémantique, ou sur les mises en œuvre… Il y a un vrai débat au sein de l’équipe. Et comme au départ je viens d’un monde académique, c’est vrai que ça me permet aussi de croiser le côté très concret et celui un peu plus stratégique, de planification et de réception, et également, de politique publique. Arriver à la Fondation Sommer a été mon plus beau cadeau pour mes 50 ans.

Fondation Sommer

« Pour Pierre Brahms – fondateur de la fondation sommer, ndlr –, l’accès à l’éducation et aux arts était la garantie pour les jeunes de se construire en tant qu’individu, mais aussi de mieux comprendre les autres. Il nourrissait le rêve d’une société ouverte et harmonieuse », explique Laura Graser, Présidente de la Fondation Sommer. La Fondation Sommer à sa création se voulait incubatrice de projets transdisciplinaires, innovants, participatifs au centre desquels se situent les enfants et les jeunes. Aujourd’hui, ce legs au cœur, qu’est-ce que la Fondation Sommer, dans quel sens a-t-elle changé, ou changera-t-elle, pour poursuivre au mieux les aspirations de Pierre Brahms ?

Pierre Brahms était quelqu’un de connu de différents milieux qui entre eux ne se connaissaient pas forcément. Beaucoup de personnes n’étaient pas au courant qu’il avait créé deux fondations, la Fondation Eté en 2009 et la Fondation Sommer en 2016 – en mémoire de sa mère Irène Sommer –. Il était très discret là-dessus. Ce qu’il aimait par-dessus tout c’était faire se rencontrer les gens autour de déjeuner. Il réunissait des hommes politiques, des gens de la finance, d’autres de la culture, des journalistes, l’intelligentsia luxembourgeoise.

Pierre Brahms aimait créer des synergies entre les gens et c’est dans cet esprit que nous travaillons. Le fil conducteur de la Fondation Sommer reste cette idée de permettre aux jeunes à travers des projets culturels et artistiques de s’émanciper. La culture est pour nous comme un levier de l’ascension sociale pour faire tomber les barrières et permettre aux jeunes de se réaliser, de s’exprimer. La jeunesse aujourd’hui a plein de choses à dire, que ce soit des aspirations, ou des craintes. La période qu’on traverse offre matière à des projets qui auraient un impact pour les jeunes mais qui soient aussi des initiatives durables, portées par des acteurs, des institutions, associations du Luxembourg.

La Fondation Sommer a une durée de vie légale de 35 ans, ça nous amène à 2051, à moins qu’il advienne autre chose ou que quelqu’un décide qu’il faut continuer… Mais dans l’esprit de P. Brahms il ne s’agissait pas de construire une cathédrale, mais de faire bouger les choses. La Fondation s’inscrit pleinement là-dedans et je pense que mon arrivée permet d’accepter une certaine évolution. Pierre Brahms était une figure très charismatique et inspirante, son décès brutal a obligé le conseil d’administration à s’engager plus en profondeur. Il y avait aussi beaucoup de discrétion de la part de Pierre Brahms sur son implication de mécène ou son travail autour de la fondation. De fait, les premiers projets financés n’ont pas eu une grande visibilité.

De mon point de vue, il faut qu’on puisse soutenir plus de projets, qu’on soit plus connu, qu’on soit force de proposition, qu’on sorte de nos murs et qu’on aille rencontrer des gens, des partenaires potentiels. Ce sont les premières étapes qui se mettent en place. Nous communiquons sans être redevable à personne, uniquement pour mieux se faire connaître et faire savoir à de potentiels porteurs de projets que nous existons.

Ça c’est vraiment un des premiers changements. Pour le reste, je ne peux pas encore rentrer dans les détails, la stratégie n’ayant pas encore été présentée au CA, mais ce qui est certain c’est qu’on poursuit les soutiens financiers tels qu’ils fonctionnent aujourd’hui, à travers quatre appels à projets dans l’année. On soutient des projets portés par des acteurs culturels, éducatifs, pédagogiques, ou sociaux que ce soit avec un accent pédagogique, dans un projet artistique, où un lycée associé à une compagnie pour proposer des ateliers et faire participer les jeunes…

Ce système fonctionne et est maintenu encore sur plusieurs années, mais il constitue juste le premier étage de la fusée. On aimerait plus accompagner les porteurs de projets mais aussi permettre des mises en relation, comme lors de notre événement au Mudam, qui a très bien fonctionné.

Ce que j’ai observé c’est que parfois on a des initiatives qui sont très belles mais qui sont éparses. Le côté duplication ou durée dans le temps est souvent minime. J’aimerais qu’à travers ces projets, on essaye de condenser tout ça, de densifier un peu plus, pour que l’impact, ce qu’on recherche, soit encore plus grand. Ce qu’on envisage c’est vraiment d’être moteur et de donner de l’impulsion aux projets. Par exemple, pour le projet « Temple » du C.A.P.E, on a été aux commandes avec l’institution pour développer un projet d’une plus grande ampleur qui leur a permis une embauche en médiation culturelle. La formation ou l’embauche font parties de nos objectifs, tout comme l’évaluation. On a récemment commandité à deux chercheuses de Cologne, une étude sur l’évaluation des projets, pour en mesurer leur impact. Elles nous ont fourni des outils qu’on est en train de tester à travers différents projets et, à terme, on aimerait bien transmettre cette méthode-là pour sensibiliser davantage à la mesure de l’impact.

C’est une manière de renforcer les acteurs, en sus de cette mise en réseau très importante. On l’a bien senti à la fin de l’événement au Mudam, beaucoup de gens nous parlent de ce besoin de communication, d’échange, de partage. J’aime faire tomber les cadres autant que possible et avec la Fondation Sommer on a potentiellement cette capacité-là. Est-ce qu’on réussira ? C’est encore autre chose, mais comme on ne dépend de personne, on a cette possibilité de mettre des sujets sur l’agenda et de les soutenir financièrement pendant un certain temps avec l’idée derrière que d’autres puissent s’en emparer. C’est un brin de l’horizon vers lequel tend la Fondation Sommer pour les cinq, voire dix prochaines années. 

Le mercredi 28 septembre, la Fondation Sommer avait convié une centaine d’acteurs des secteurs de l’éducation et de la culture à une première rencontre professionnelle intitulée « Culture et jeunesse ». Organisé au MUDAM, l’événement a donné lieu à des échanges et des débats autour d’une thématique commune aux publics présents : « Comment l’art et la culture peuvent-ils renforcer le développement personnel des enfants et des jeunes au Luxembourg ? ». De quelle manière, les actions et projets de la Fondation Sommer, répondent-t-ils à cette grande question sociétale ?

En fait le rendez-vous au Mudam était vraiment très généraliste. C’était plus une présentation de la fondation autour des témoignages de trois des porteurs de projets sélectionnés. Il s’agissait d’inspirer d’autres porteurs de projets. Il est possible qu’on refasse ce type de rencontres mais sans savoir quand. Ce que je vois plutôt et que je vais essayer de mettre en place d’ici la fin de l’année ce sont des plus petits formats, probablement en nos murs, des réunions de travail avec une thématique précise, comme par exemple « comment faire des résidences d’artistes en milieu scolaire ? ». Il y a quelque chose qui est ressorti durant cette rencontre au Mudam, c’est ce besoin de mise en réseau. Des plateformes existent, on ne va pas réinventer la roue, mais il y a plus de besoins. En tout cas, il y a de la place pour proposer quelque chose d’autre, de complémentaire. C’est l’un des axes de développement de la Fondation que de mettre en relation artistes et acteurs culturels et sociaux. 

Fondation Sommer

Dans vos récentes communications vous mettez en avant trois projets phares de la fondation : le Mudam Student Reporters autour de l’exposition de William Kentridge au Mudam (février à juin 2021), le projet Danseurs à l’école à Vauban, École et Lycée français de Luxembourg (année scolaire 2021-22), et le projet Temple du CAPE d’Ettelbruck (saison 2020-21). Autant d’exemples qui définissent l’identité de la Fondation. Comment sélectionnez-vous les projets que la Fondation Sommer accompagne ?

Véronika et moi-même on reçoit les candidatures et on les examine. On fait une présélection en fonction de nos critères établis autour de trois types de projets : les projets pédagogiques : « Permettre à chacun de devenir l’acteur de sa vie », les projets culturels en binôme : « Imaginer une coopération nouvelle en matière d’éducation culturelle et artistique », et les projets interculturels en binôme : « Bâtir des ponts entre les cultures ». Dans le premier cas, la dimension pédagogique est primordiale que ce soit dans les questions de transmission, ou de vulgarisation de la culture. Pour les projets en binôme, on s’assure de la synergie entre les deux structures, et de ce qu’ils attendent comme résultat, comme changement et ce qu’ils envisagent pour l’avenir de la structure d’accueil.

Ensuite, on présente les projets au Conseil d’Administration en expliquant nos motivations de soutien et le montant. Des débats s’en suivent et peuvent permettre de réviser nos propres choix, par rapport à une vision différente du CA. Ce qui est très important pour nous c’est que le projet artistique et culturel permette aux jeunes de se construire lui-même, de mieux se connaître, et aussi dans le rapport aux autres. Ce côté collectif dans le projet doit apparaître pour tendre vers une création commune. Par exemple, certains jeunes se retrouvent sur scène, d’autres font de la scénographie, du costume… Nous soutenons la partie d’un projet qui correspond aux objectifs de la Fondation Sommer.

Ce qui nous intéresse c’est la teneur et la pertinence du projet artistique plus que la finalité. Nous ne jugeons pas de la qualité d’un spectacle, c’est vraiment le travail de processus qui nous intéresse. L’important pour nous est la cohérence dans la mise en place du projet, sa dynamique innovante et évidemment la prise en compte du public cible. L’identification du public est une chose importante dans les projets que nous soutenons car l’un ou l’autre ne touchera pas les mêmes jeunes. C’est un facteur qui doit être clair au moment du dépôt d’un dossier, autant que sa cohérence et sa faisabilité, c’est pourquoi on demande souvent un calendrier de l’action.

C’est aussi notre rôle de suivre le développement des projets. Car l’un des autres grands changements que va opérer la Fondation réside dans la continuité des actions. Si un projet fonctionne, pourquoi ne pas réfléchir à « l’année deux », ou à une multiplication des groupes d’élèves. C’est dans mon désir de décliner des perspectives et de pousser les porteurs de projets à envisager l’année d’après, en sollicitant aussi d’autres partenaires par exemple.

Ce volet de soutien auprès des porteurs de projets est très intéressant, d’autant qu’il pousse de fait à un travail transversal avec eux pour répondre à vos objectifs directs et aux leurs…

On est encore dans une phase où on reçoit moins d’une dizaine de projets par appel, c’est donc tout à fait gérable pour nous et puis comme je le disais, notre travail s’adresse aussi aux porteurs de projets. C’est aussi notre mission que de renforcer ces acteurs culturels dans leur travail. On n’est pas là pour donner des bons points, dire c’est noir ou c’est blanc, parfois des projets ne rentrent pas dans nos critères de sélection mais on reste sensible au potentiel, et on essaye d’offrir une seconde chance, pour que le projet puisse être un peu plus abouti et converger vers nos objectifs. Et si définitivement ça ne colle pas, il y’a d’autres bailleurs potentiels, et on n’hésite pas non plus à renvoyer les gens vers d’autres personnes.

Dans notre accompagnement, on ne se positionne pas comme la police des projets culturels mais par contre on les invite à nous tenir informés des moments-clés. On est toujours friands d’aller voir le travail en cours, d’être tenus informés des grandes étapes et surtout des difficultés rencontrées. Si ça ne va pas, le porteur de projet a toute notre attention, et ensemble on peut trouver des solutions. Ensuite, au-delà des rapports financier et narratif, on propose à la fin du projet un rendez-vous de clôture, sous forme de restitution ou de discussion. Les porteurs de projets sont souvent plus à l’aise à l’oral de parler du déroulement de leur projet. Ce rendez-vous permet aussi de parler de l’avenir. C’est toujours un moment important pour nous et les porteurs de projet. Au Mudam, par exemple, c’est au moment de l’entretien final qu’a germé cette idée de proposer une rencontre entre acteurs culturels six mois plus tard. Un formulaire ne remplacera jamais une rencontre humaine.

TEMPLE

« Ambitionnant d’impulser un changement social afin que les enfants et les jeunes évoluent dans une société plus ouverte et plus respectueuse des personnes et des communautés », comme vous le décrivez, la Fondation Sommer a pour grande ligne de travail l’empowerment des jeunes à travers l’art et la culture. Alors, autour de vos projets et actions, des enjeux forts sont distillés. Pouvez-vous nous décrire quels-sont les impacts des projets que vous soutenez et les dynamiques de suites qu’ils provoquent auprès des jeunes impliqués ?

Ça fait partie des choses qui sont encore pour moi les moins perceptibles parce que je n’ai pas suivi encore de projet de A à Z. Et puis, il y a deux aspects dans la réponse à cette question. La première c’est que nous n’avons pas de lien direct avec les jeunes. À part, par exemple, durant le projet Temple au CAPE, où certains membres du CA sont allés plusieurs fois découvrir les workshops. Nous devons travailler à documenter davantage les retours des jeunes. Les porteurs de projet documentent les impressions des jeunes, qui sont souvent très intimes et liées à leur vécu, et peuvent témoigner des ressorts de leur projet. Personnellement, j’ai assisté à un débriefing d’ateliers théâtre menés dans une école, et de la même manière des jeunes qui au départ n’osaient pas se sont ensuite révélés à l’aise sur une scène et leader dans un contexte. Ce sont des résultats merveilleux.

Chacun doit trouver sa place au cœur d’un projet. C’est important pour nous. Et quand le Mudam reçoit trois demandes de stage après le projet mené, c’est une victoire pour nous. Cette dimension d’ouverture à des vocations, ou en tout cas à la découverte des métiers de la culture, est très importante pour nous. C’est aussi un indicateur par rapport à une projection des jeunes dans ce milieu professionnel.

On réfléchit à comment mutualiser les outils d’évaluation pour pouvoir jauger les résultats des actions qu’on finance. C’est quelque chose qu’on va mettre en place. Et pourquoi pas imaginer une rencontre directement avec les jeunes, même si ce n’est pas vraiment notre cœur de métier. Ça fait partie des choses que j’ai dans la tête, mais je dois encore structurer ma pensée.

On a une belle plaine de jeux, si je puis dire ça comme ça. On a senti de vraies volontés d’échanges et de travaux de la part des acteurs culturels et des institutions, pour continuer sur le même chemin. Personnellement je suis maman, mon enfant est dans le système luxembourgeois et je vois comment la culture pourrait être beaucoup plus présente au niveau scolaire. Je sens bien que pour l’instant ce ne sont pas deux secteurs qui se parlent beaucoup. On a vraiment besoin de faire bouger les choses de ce côté, à la lumière des préoccupations des jeunes aujourd’hui, entre la Covid, la guerre en Ukraine, les incertitudes économiques, et écologiques… C’est une génération qui a beaucoup d’interrogations, et la société a une responsabilité envers eux.