LUGA Art Trail

26 mai. 2025
LUGA Art Trail
Animals of the Mind

Article en Français
Photo : Anna Hulacova © Patty Neu

LUGA, Luxembourg Urban Garden. Vous connaissez ? Une exposition inédite et éphémère, en plein air. Jardins urbains, installations paysagères et artistiques, projets agricoles et lieux de vie, visibles jusqu’au 18 octobre 2025. Placées sous le thème « Rendre visible l’invisible », ces installations prennent vie sur cinq sites emblématiques du Grand-Duché. L’objectif ? Explorer la ville écologique de demain. Réfléchir à l’équilibre entre nature et urbain. Sensibiliser le public grâce à des parcours originaux et inattendus. Lancer une réflexion sur le vivant. Évènement unique en son genre, pionnier dans son approche et accessible à tous.

La figure animale au cœur d’un parcours artistique unique

Alors, qu’est-ce que le LUGA Art Trail ?  Un parcours complémentaire, s’inscrivant au cœur cette exposition grandeur nature et mettant la faune à l’honneur. Comment ? En reprenant le thème principal de l’événement – « Rendre visible l’invisible » – ce chemin artistique intitulé Animals of the Mind fait écho  et s’imbrique à la LUGA, sous la forme d’un ensemble de sculptures, d’installations, d’œuvres vidéo, de performances et d’interventions in situ autour de la figure animale.

Entretien exclusif avec Boris Kremer, curateur de l’exposition LUGA Art Trail.

 

Pourquoi ajouter à la LUGA un parcours sur le thème animal ? 

Animals of the Mind part du principe que l’on ne saurait penser la flore sans évoquer la faune. Or, les animaux qui la composent ont, pour certains, la fâcheuse habitude d’être invisibles. Invisibles parce qu’ils se cachent pour échapper à leurs prédateurs. Invisibles parce qu’ils se font minuscules. Invisibles parce qu’ils sont de l’ordre des chimères qui alimentent fables et légendes. Invisibles, encore, parce qu’entassés dans des stations d’élevage et des abattoirs à l’abri des regards. Invisibles, enfin, parce qu’ils sont en voie d’extinction, si ce n’est déjà fait. Or, cette invisibilité est encore plus marquée dans le milieu urbain.

Les œuvres créées pour ce parcours entendent nous impliquer de manière engageante dans les débats sur nos rapports avec le vivant, la nature, qui sont au cœur du projet de la LUGA.

Comment le parcours s’articule-t-il ?

Ce sont au total une douzaine d’œuvres réalisées in situ par des artistes plasticiens internationaux. Spécialement conçues pour le site et la thématique de l’exposition. Au sujet du choix des matériaux, nous avons eu beaucoup de discussions. Bois, argile, acier. Un cahier des charges a été défini, visant à sensibiliser les artistes aux enjeux écologiques. Afin qu’ils les mettent au centre de leur pratique. Dans le cadre de ce parcours, c’est le cahier des charges du ministère de l’environnement sur les interventions dans un espace vert, souvent protégé, qui a été particulièrement précis. Ne pas creuser à plus de 25 cm. Pas de béton pour les fondations, une gageure pour les artistes travaillant des sculptures ! Pas d’espèces invasives, si l’artiste travaille avec du vivant. Pas de pollution sonore. Ni visuelle. 

Comment avez-vous sélectionné les artistes ?

J’ai orienté ma sélection vers des artistes plasticiens qui avaient soit une affinité pour le monde animal, soit un travail essentiellement lié à cet univers. Ensuite, j’ai essayé de restreindre mon choix selon deux critères. Le premier, géographique. Solliciter des artistes lointains n’avait pas de cohérence. Les artistes sélectionnés viennent donc de France, d’Allemagne, du Luxembourg, de Hollande et d’Italie. Le deuxième critère, l’adaptabilité. Les contraintes de temps, logistiques et environnementales ont orienté mon choix vers des artistes susceptibles d’une grande flexibilité pour ce projet élaboré dans un temps record.

Comment les artistes ont-ils réagi au projet ?

Tous ont répondu favorablement. Dans un premier temps, ils ont été interpellés de travailler non seulement en extérieur, mais aussi dans ce contexte plus vaste, celui de lancer une réflexion sur le vivant au-delà du jardin. Au final, un engouement unanime pour le site et son passé chargé d’histoire. L’une des complémentarités de ce projet a été de travailler avec le patrimoine culturel luxembourgeois et de le valoriser. Des musées et des lieux de mémoire du patrimoine où le public n’a pas l’habitude d’aller ou d’avoir accès.

Anne-Charlotte Finel © LUGA 

Pouvez-vous nous citer un exemple ?

La chapelle Saint Quirin dans la vallée de la Pétrusse. Classée patrimoine historique, elle est aménagée dans une grotte naturelle. Dans ce lieu fermé au public depuis les années 1970, nous avons obtenu, avec l’accord de l’architecte de la ville, du Ministère de la culture et de l’Institut national pour le patrimoine architectural, INPA, de mettre en place la double projection vidéo Sphinx réalisée par la française Anne-Charlotte Finel, que le visiteur peut découvrir à travers les grilles de la chapelle. En parallèle, nous avons souhaité rendre le site accessible en organisant des visites guidées tous les samedis. Ainsi l’objectif est double : valoriser un lieu inédit du patrimoine luxembourgeois tout en découvrant une œuvre d’art atypique.

Marie-Audrey Ramirez © LUGA

Autre exemple, dans le site d’une meurtrière dans la citadelle Saint-Esprit, avec l’œuvre expérimentale Blobby and Boo de l’artiste luxembourgeoise Mary-Audrey Ramirez. Il s’agit d’une double créature, témoignant des possibilités et des limites de l’intelligence artificielle, qui semble émerger des casemates de la forteresse à plus de vingt mètres de hauteur. Là encore, de nombreuses institutions ont été sollicitées pour mettre en place cette œuvre dans ce site patrimonial.

Avec quel autre organisme avez-vous collaboré ?

Le LUCA, Luxembourg Center for Architecture. Ce centre réalise une exposition dans ses locaux à Clausen sur la réponse des architectes aux défis urbanistiques pour les animaux. Dans le cadre du parcours, les architectes italiens du Studio Ossidiana exposent la Pigeon Tower, présentée pour la première fois à la Biennale de Venise en 2021. Une version contemporaine du pigeonnier traditionnel.

Studio Ossidiana © LUGA

Certains artistes ont travaillé avec des matériaux différents pour les besoins du parcours ?

Le français Laurent Le Deunff a réalisé pour l’Art trail des Totems en bois, et non pas en rocaille, son matériau de prédilection. C’est le service forêt de la ville de Luxembourg qui lui a fourni le bois tout en lui aménageant un espace de travail spécifique pendant deux semaines. Les quatre sculptures sont des animaux qui évoquent la littérature ou la mythologie luxembourgeoise. Renard, souris, cerf et tourterelle.

Laurent Le Deunff © Patty Neu

Les œuvres exposées vont-elles parfois au-delà du visuel ? 

Tout à fait. Les artistes français Cengiz Hartlap et Sara Lefebvre ont conçu une œuvre sonore totalement immersive et participative, Tout couche sous le kepenek. Le concept créatif est d’inviter les visiteurs de tous âges à endosser le kepenek, un vêtement ancestral porté par les bergers des plateaux montagneux d’Anatolie. Équipé d’un dispositif sonore, chaque kepenek permet au visiteur qui le porte d’écouter un récit fantastique et historique autour des pratiques pastorales agricoles qui, jusqu’à son aménagement en jardin public au 19e siècle, caractérisaient la vallée de la Pétrusse. L’histoire est contée par les acteurs luxembourgeois Steve Karier et Elsa Rauchs en quatre langues. 

© Rémy Markowitsch

Autre exemple, la sculpture Juliens Maus de l’artiste suisse Rémy Markowitsch, objet d’un film tourné depuis l’ascenseur panoramique. L’œuvre et la vidéo associée, accessible par code QR et projetée dans la Tour Vauban, rendent hommage à la première victime de Saint Julien l’Hospitalier : la petite souris blanche, telle que racontée par Gustave Flaubert dans ses Trois Contes (1877).  

Atelier Van Lieshout © Patty Neu

Où peut-on découvrir ces œuvres ?

Essentiellement entre le parc Pescatore et la Villa Baldauff, fraîchement rebaptisée Villa Pétrusse, et la vallée de la Pétrusse. Pour les retrouver, c’est assez simple, le site de la LUGA propose des cartes par zones géographiques, sur lesquelles les œuvres de ce parcours sont répertoriées.

Attention, la majorité de ces œuvres sont éphémères. Dès le 19 octobre, elles seront toutes retirées. Il faut en profiter !

Artistes: 

Atelier Van Lieshout, Roland Boden, Anne-Charlotte Finel, Henrik Hakansson, Cengiz Hartlap & Sara Lefebvre, Anna Hulacova, Laurent Le Deunff, Rémy Markowitsch, Mary-Audrey Ramirez, Studio Ossidiana, Ulrich Vogl

Pour en savoir plus : www.luga.lu

Auteurs

Geneviève du Parc Locmaria

Artistes

Boris Kremer
Anne-Charlotte Finel
Mary-Audrey Ramirez
Luxembourg Center for Architecture
Studio Ossidiana
Laurent Le Deunff
Cengiz Hartlap
Sara Lefebvre
Steve Karier
Elsa Rauchs
Rémy Markowitsch
Atelier Van Lieshout
Roland Boden
Anne-Charlotte Finel
Henrik Hakansson
Cengiz Hartlap
Sara Lefebvre
Anna Hulacova
Laurent Le Deunff
Rémy Markowitsch
Mary-Audrey Ramirez
Studio Ossidiana
Ulrich Vogl

Institutions

Luxembourg Urban Garden

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