06 juin. 2025Radio Luxembourg Echoes across borders

Avec la donation Gaby et Wilhelm Schürmann, le Mudam Luxembourg présente une nouvelle exposition Radio Luxembourg : Echoes across borders.
Cette exposition réunit plusieurs générations d’artistes femmes nées en Europe et aux États-Unis entre 1930 et 1991. Le point de départ de ce projet unique ? La donation d’ampleur d’un couple de collectionneurs allemands, Gaby et Wilhelm Schürmann, au musée fin 2023. Une vingtaine d’œuvres récemment intégrées à la collection, avec le soutien des membres du Cercle des collectionneurs du Mudam Luxembourg.
Immersion en direct avec Marie-Noëlle Farcy, commissaire de l’exposition.

Comment s’articule cette exposition ?
Marie-Noëlle Farcy : Grâce à la donation exemplaire de Gaby et Wilhelm Schürmann, il nous a paru intéressant de faire dialoguer les deux collections. À la fois, mettre en lumière ces œuvres récemment intégrées au Mudam Luxembourg et les faire résonner avec la collection existante du musée. Suivant cette idée, nous avons opéré une sélection de pièces réalisées par des femmes à la fois au sein de la donation et également dans le fonds actuel du musée pour mettre en place ce nouvel accrochage.
Pourquoi ces collectionneurs ont-ils fait don de cette collection au Mudam ?
M-N.F. : Gaby et Wilhelm Schürmann sont dans une perspective de s’interroger sur la place de leurs œuvres, notamment celles d’envergure monumentale. Doivent-elles être rendues visibles dans des institutions publiques ? Le Mudam Luxembourg leur est apparu comme le lieu d’exposition adéquat pour accueillir leurs œuvres. Le titre de l’exposition Radio Luxembourg : Echoes across borders fait référence aux souvenirs d’enfant de Wilhelm Schürmann. Jeune, en bricolant sa radio, il a eu accès à Radio Luxembourg, l’ancêtre de RTL, qui émettait à partir de 1933 en Europe occidentale et centrale. Cela a été pour lui une ouverture vers un autre univers musical. Le choix du Mudam Luxembourg révèle donc à la fois une réminiscence affective et aussi un écho du monde artistique au-delà des frontières, comme vecteur d’ouverture sur l’univers.
Les donateurs sont-ils intervenus dans l’accrochage des œuvres ?
M-N.F. : Une fois léguées, les donateurs cèdent intégralement leurs œuvres et leur visibilité. En devenant propriété du musée, les œuvres passent tout à coup d’un univers domestique à un univers public. Pour cette exposition, le cas de figure est différent. Il s’est instauré des liens plus étroits entre l’institution et le donateur, étant donné le profil pluridisciplinaire de Wilhelm Schürmann. Son statut de commissaire d’exposition lui a permis de participer activement à la sélection des œuvres et à l’élaboration d’un parcours très intuitif.

Photo : Jens Ziehe © Galerie Barbara Thumm
Par quelle œuvre débute l’exposition ?
M-N.F. : Installée dans le hall central du musée, l’œuvre de l’artiste Fiona Banner aka The Vanity Press, Nude Wing, est l’un des points forts de l’exposition. Une véritable pièce introductive. Haute de près de six mètres, cette sculpture monumentale se compose d’une aile d’avion Tornado entièrement polie, placée à la verticale. Il s’agit d’une œuvre emblématique du travail de l’artiste. Cette dernière s’inspire des avions de chasse et transpose cette mémoire personnelle à un imaginaire collectif associé aussi bien au cinéma, aux parades, qu’aux scènes de guerres.
Ce qui est fascinant ici, dans ce hall, c’est l’aspect monumental de l’œuvre, complètement travaillé par l’espace. Comme l’objet est poli, tout est réfléchissant. L’environnement baigné de lumière lui confère un effet presque flottant, voire léger et aérien. Le visiteur se retrouve devant un objet sculptural monumental en 3D dans un espace. Il va pouvoir interagir en tournant autour de l’œuvre, en l’observant sous plusieurs angles. Elle apparaît et disparaît à la fois. L’œuvre semble faite pour le lieu.

Photo : Studio Rémi Villaggi © Mudam Luxembourg
Comment se déroule la suite de l’exposition ?
M-N.F. : À l’étage, le nouvel accrochage de la Collection Mudam se situe dans le cadre d’une exposition collective « pure ». Créant à la fois des connexions conceptuelles entre toutes les œuvres et faisant aussi écho à celle de Fiona Banner. À noter que pour le jeu de l’exposition, certaines œuvres issues de la collection personnelle de Wilhelm Schürmann viennent ponctuer le parcours.
Comment décrire cette exposition ?
M-N.F. : Il ne s’agit pas d’une exposition thématique. Nous avons voulu jouer avec l’espace sans travailler une scénographie particulière. Plutôt en tirant partie de l’architecture du bâtiment afin de créer des dialogues visuels. Le nom de l’exposition suggère d’ailleurs qu’au-delà des frontières, les œuvres et les messages peuvent résonner.
Ici, les artistes s’interrogent sur la relation à l’espace et offrent de nouvelles approches à travers la question du langage, de l’architecture ou bien encore des objets quotidiens.

Photo : Wilhelm Schürmann, Herzogenrath
Pour Stairway, l’artiste polonaise Monika Sosnowska s’inspire d’un escalier de secours découvert à Tel Aviv. Celui de l’artiste revêt une forme chaotique, coincée entre sol et plafond. Résultat possible d’une catastrophe. Reflet d’une évolution sociale ou politique. Tel un monument de la ruine, au bord de l’effondrement et menacé d’atteindre son point de rupture.
Avec les Navigation Poems, l’artiste luxembourgeoise Carine Krecké explore diverses stratégies pour aborder des images de violence, recueillies par Google dans les rues de Ciudad Juarez au Mexique et interdites de diffusion. Écrits en anglais et inspirés par les images collectées, les poèmes évoquent des scènes de la vie quotidienne de la ville et brossent un portrait sensible de la ville. Le choix de Carine Krecké s’est doublement imposé. D’une part, par son parcours interdisciplinaire entre art, littérature et géopolitique. Et aussi puisque son projet Perdre le nord sera exposé aux Rencontres d’Arles dès le 7 juillet prochain, comme lauréate du Luxembourg Photography Award 2025.

Photo : Romain Girtgen © CNA Dudelange
Quelles ont été les contraintes dans le choix des œuvres ?
M-N.F. : L’absence de scénographie a exclu le choix d’un certain nombre de pièces. La volonté de résorber la disparité et mettre l’accent sur la place des artistes femmes a orienté la sélection. Sans pour autant en faire son unique dessein. Le désir de s’intéresser aux trois dimensions, aux pièces monumentales et comment la sculpture et l’espace peuvent être investis par les mots.
On retrouve aussi des articulations de peinture – celles de Miriam Cahn ou Birgit Megerle – qui proviennent de la collection personnelle de Wilhelm Schürmann. Ces œuvres permettent d’intégrer la représentation et la figuration humaines dans l’exposition et d’introduire un jeu d’échelle au milieu de ces pièces très architecturées. Certaines pièces monumentales vont venir dialoguer avec le tout petit.
Exposition à découvrir au Mudam Luxembourg jusqu’au 11 janvier 2026. Nude Wing de Fiona Banner aka The Vanity Press est exposée jusqu’au 24 août 2025.
Artistes : Leonor Antunes, Fiona Banner aka The Vanity Press, Monika Baer, Andrea Bowers, Miriam Cahn, Carine Krecké, Jessica Diamond, Dominique Ghesquière, Annette Kelm, Eva Kot’átková, Zoe Leonard, Birgit Megerle, Isa Melsheimer, Hana Miletić, Hendl Helen Mirra, Henrike Naumann, Charlotte Posenenske, Monika Sosnowska, Joëlle Tuerlinckx, Diana Thater, Nora Turato
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